Protégez-vous !

27 Oct Protégez-vous !

Transporteurs, commissionnaires de transport ou tout autre intérêt cargaison : protégez-vous !

Le transport de marchandises met en jeu la responsabilité de différents acteurs participant à l’opération et ce, en cas de perte ou d’avarie de la marchandise ou de retard à la livraison.

Qui a manqué à ses obligations et qui supportera la responsabilité des dommages? Le transporteur présumé responsable sauf preuve d’une cause d’exonération? L’expéditeur? Le destinataire? Le commissionnaire de transport, responsable de son propre fait et de ceux de ses substitués? la société en charge de l’emballage ou tout autre intervenant ?

Pour éviter, ou encore préparer, une réclamation et protéger ses intérêts au niveau de la constatation du dommage et de la conservation de la preuve, une partie au contrat de transport peut organiser, à chaque étape du transport, une expertise judiciaire conservatoire en se fondant sur l’article L.133-4 du code de commerce qui dispose que :

«En cas de refus des objets transportés ou présentés pour être transportés, ou de contestation de quelque nature qu’elle soit, sur la formation ou l’exécution du contrat de transport, ou à raison d’un incident survenu au cours même et à l’occasion du transport, l’état des objets transportés ou présentés pour être transportés et, en tant que de besoin, leur conditionnement, leur poids, leur nature, etc., sont vérifiés et constatés par un ou plusieurs experts nommés par le président du tribunal de commerce ou, à défaut, par le président du tribunal d’instance et par ordonnance rendue sur requête.

Le requérant est tenu, sous sa responsabilité, d’appeler à cette expertise, même par simple lettre recommandée ou par télégramme, toutes parties susceptibles d’être mises en cause, notamment l’expéditeur, le destinataire, le voiturier et le commissionnaire, et les experts doivent prêter serment, sans formalité d’audience, devant le juge qui les a commis ou devant le juge du tribunal d’instance où ils procèdent. Toutefois, en cas d’urgence, le juge saisi de la requête peut dispenser de l’accomplissement de tout ou partie des formalités prévues au présent alinéa. Mention est faite de cette dispense dans l’ordonnance.

Le dépôt ou séquestre des objets en litige, et ensuite leur transport dans un dépôt public, peut être ordonné.

La vente peut en être ordonnée jusqu’à concurrence des frais de voiture ou autres déjà faits. Le juge attribue le produit de la vente à celle des parties qui a fait l’avance desdits frais.»

Cette mesure a pour objet les vérification et constatation de l’état des marchandises transportées ou à transporter, de leur conditionnement, poids et nature, notamment lorsqu’il y a refus des marchandises, contestation sur la formation ou l’exécution du contrat de transport ou incident survenu au cours même et à l’occasion du transport.

La procédure est simple et rapide, puisque la requête, document présentant les faits et la demande d’expertise, est présentée devant le Président du Tribunal de Commerce ou le Président de la Chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance ou à défaut devant le Président du Tribunal d’Instance du lieu où se trouve les marchandises.

Il n’aurait pas la possibilité de rejeter la demande d’expertise, dès lors qu’une des conditions posées est remplie (refus, contestation, incident).

Le Président, après avoir écouté le requérant et étudié les pièces, rend immédiatement une ordonnance commettant tel expert  judiciaire indépendant afin de de vérifier et de constater de l’état des marchandises.

Il est d’ailleurs d’usage que le requérant prépare un projet d’ordonnance détaillant la mission de l’expert que le Président peut amender et/ou compléter.

Prenant en considération les spécificités du monde du transport, à savoir l’éloignement des différents intervenants avec le lieu de stationnement des marchandises, pour peu que le transport soit international, rapidité des flux, l’immobilisation préjudiciable des marchandises et du véhicule, les formes requises pour la convocation des parties à l’expertise sont particulièrement assouplies, le requérant pouvant user de la lettre recommandée, du télégramme, mais également de la télécopie. sauf à avoir été dispensé de convoquer.

En effet, en cas d’urgence, à caractériser dans la requête, la dispense de convocation à l’expertise des parties intéressées au transport peut être demandée au jug qui, s’il accède à cette demande, devra l’indiquer explicitement dans son ordonnance.

Si elle n’est pas réclamée ou si le juge rejette la demande de dispense, les parties susceptibles d‘être mises en cause, devront être convoquées par le requérant sous sa propre responsabilité, c’est à dire qu’il devra rapporter la preuve d’envoi de la convocation et de sa bonne réception.

La sanction d’un défaut de convocation ou d’une convocation tardive, le requérant devant laisser aux parties convoquées un délai suffisant pour organiser leur participation aux opérations ou se faire assister, est l’inopposabilité du rapport d’expertise à ces parties

Quant aux parties intéressées par la mesure, le requérant pourra convoquer selon l’article «(…)Toutes parties susceptibles d’être mises en cause, notamment l’expéditeur, le destinataire, le voiturier et le commissionnaire (…)», la liste n’étant pas limitative et comprenant la partie en charge de l’emballage et tout fournisseur de matériels (conteneur, remorque, tracteur), par exemple.

Dès que il aura été désigné, la juridiction lui adressera l’ordonnance par télécopie et, sauf dispense de convocation, l’expert judiciaire devra s’organiser avec le requérant pour la mise en œuvre des opérations d’expertise.

Si l’expert désigné n’est pas expert judiciaire, le texte a prévu une prestation de serment, sans formalité, devant le juge qui l’a commis, en pratique et selon les juridictions, la prestation de serment pouvant se faire par courrier.

L’expertise se déroule ensuite comme toute expertise: réunion d’expertise en présence des parties convoquées ou de leur représentant, communication de dires éventuels des parties et dépôt du rapport qui sera opposable à toutes les parties, même en cas de dispense de convocation, et du fait de son caractère conservatoire et probatoire, elle s’effectue tous droits et moyens réservés.

Enfin, il est important de noter que cette expertise judiciaire conservatoire n’interrompt pas la prescription d’un an, à la différence de l’assignation en référé en vue de désignation d’un expert judiciaire et qu’elle ne dispense pas les parties de prendre toute réserve utile et circonstanciée sur le document de transport et de notifier les réserves, sauf si la demande d’expertise est formée dans le délai de 3 jours à réception des marchandises, conformément aux dispositions du 2ème alinéa de l’article L.133-3 du code de commerce.

Ainsi, l’expertise au visa de l’article L.133-4 du code de commerce, comme rappelé par la Cour de Cassation «constitue une mesure conservatoire prescrite dans l’intérêt commun de ceux que l’état de la marchandise intéresse et qu’une autorité légale lui est acquise à l’égard de tous (…)» (Cass.com, 9 juillet 1953: JCP G 1954, II, 8072) et le doyen R. Rodière (R. Rodière, Droit des transports. Transports terrestres et aériens: Sirey, 2ème éd. 1977, n°512) rappelant ce caractère protecteur d’écrire qu’il s’agit d’une «procédure destinée à photographier aussi vite que possible les faits qui fondent la prétention du demandeur ou les moyens de défense du défendeur».

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